Obligation vaccinale – Petite mise au point : COVID-19 n’est pas polio

Durant la crise sanitaire du Covid-19, et plus particulièrement depuis qu’une vaccination obligatoire est évoquée par ceux qui pensent que ce qu’on peut faire pour combattre un virus peut automatiquement être appliqué à un autre, on lit et on entend souvent prendre la vaccination contre la poliomyélite comme exemple de vaccination obligatoire. En effet elle est la seule vaccination obligatoire en Belgique, c’est donc l’exemple idéal, souvent mis en avant par des autorités politiques : « la vaccination anti-polio est bien obligatoire, pourquoi pas la vaccination anti-COVID-19 ? » Pire encore : « on a éradiqué la polio par la vaccination, il faut le faire aussi pour la COVID-19 : si on vaccine tout le monde, on sera enfin débarrassé de ce virus« . Tout simplement parce qu’il ne s’agit pas, mais pas du tout, du même virus.

Et voilà un exemple frappant de l’erreur type qui résulte d’une mauvaise connaissance du sujet. Corrigeons le tir…


I. L’illusion polio

La poliomyélite est une paralysie flasque irréversible affectant le plus souvent les membres inférieurs. Elle est provoquée par trois sérotypes (les sérotypes correspondent à une classification basée sur des différences antigéniques pouvant être mises en évidence par l’utilisation d’anticorps spécifiques de chaque groupe, donc par sérologie) distincts du Poliovirus (un Entérovirus de la famille des Picornavirus – petits virus à ARN).

Jusqu’à la fin du 19ème siècle, ces virus étaient endémiques et circulaient sur toute la planète. L’infection était généralement limitée au système digestif et peu pathogène, avec de rares paralysies chez les jeunes enfants par la destruction des neurones moteurs (qui activent les muscles). En fait, l’infection se développe habituellement dans les muqueuses digestives, les virus sont excrétés dans les selles et se propagent par les eaux usées.

Toutefois, durant la première moitié du 20ème siècle, aux États-Unis et en Europe où l’hygiène a fait des progrès énormes, se sont développées paradoxalement des épidémies locales et temporaires de plus en plus sévères atteignant plus particulièrement des grands enfants, des adolescents, voire de jeunes adultes, sévèrement handicapés au niveau des membres inférieurs et qui pouvaient également présenter une atteinte des muscles thoraciques, nécessitant le maintien sous assistance respiratoire, dans un « poumon d’acier ». A l’âge adulte, l’incidence des paralysies chez les sujets infectés atteint 1,33%.

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Cycle infectieux des poliovirus (source : Beyond The Dish, Blog, 2015)

Face à ce désastre épidémique progressant dans les pays les plus nantis, des vaccins ont été développés dans la deuxième moitié des années 1950 grâce aux travaux (indépendants) de Jonas Salk et d’Albert Sabin.

  • Le vaccin Salk est un poliovirus inactivé, injectable, basé sur les trois sérotypes (1, 2 et 3). Les anticorps qu’il suscite neutralisent les virus sauvages s’ils passent dans le sang, les empêchant de gagner les neurones moteurs et évitant ainsi la paralysie. Le vaccin Salk n’empêche pas la multiplication des virus sauvages dans le système digestif et n’entrave pas la circulation du virus sauvage dans l’environnement, ni sa propagation inter-humaine. Il exige donc une vaccination universelle et pour toutes les générations successives, par injection, de surcroit. Il est toutefois plus facilement transportable, n’exigeant pas une chaîne du froid draconienne. La vaccination prévient dès formes graves mais n’empêche pas la transmission.
  • Le vaccin Sabin est également composé des trois types de Poliovirus, sous forme atténuée. L’atténuation ne rend pas le virus inactif mais l’empêche d’atteindre le système nerveux, ce qui est essentiel. Le vaccin est administré par voie orale, ce qui est considérablement plus commode qu’une injection, surtout avec les enfants. Ces virus atténués restent capables de se multiplier, génèrent une immunité mucosale, ce qui empêche l’infection par le virus sauvage. Toutefois, le vaccin Sabin nécessite une conservation à basse température. En outre, il ne peut absolument pas être administré à des enfants souffrant d’immunodéficience. La plus grande difficulté avec le vaccin Sabin est, bien que les poliovirus soient rarement sujets à mutations, l’apparition incontrôlable de révertants, ayant recouvré tout le pouvoir infectieux et pathogène du virus sauvage. Les révertants peuvent provoquer une paralysie et se propager comme un virus sauvage. Malgré cet inconvénient, ce vaccin à virus atténué reste préférable en ceci qu’il entrave la propagation du virus et sa transmission.

En résumé, on dispose là de deux types de vaccins, très efficaces pour empêcher les formes graves de la polio mais dont l’un (Sabin) est capable de neutraliser le virus dans sa voie de passage obligée et donc d’entraver sa propagation, ce que l’autre (Salk) ne peut empêcher.


II. La vaccination universelle contre la poliomyélite

En 1988, l’OMS a lancé un programme de vaccination universelle avec, pour objectif, l’élimination définitive des 3 sérotypes de poliovirus. Ce projet n’a pu être envisagé que par :

1) la disponibilité de vaccins efficaces (ici un vaccin atténué de type Sabin, capable d’empêcher la transmission),

2) le caractère exclusivement humain du cycle de reproduction virale et l’absence de réservoir animal pour ces virus ;

3) une stabilité antigénique du virus qui est peu sujet à mutations, trois caractéristiques indispensables avant d’imaginer pouvoir éventuellement éradiquer un virus ;

Malgré cet ensemble de caractéristiques favorables et indispensables, l’éradication de la polio, prévue après 12 ans de campagne mondiale (objectif an 2000) n’est toujours pas atteinte aujourd’hui comme le montre le planisphère ci-dessous, et n’est plus à présent espérée avant 2030.

Carte actualisée des cas de poliomyélite due à divers sérotypes de poliovirus répertoriés dans le monde
dans le cadre de la campagne d’éradication de la polio pilotée par l’OMS.

Dernière remarque : on est bien, avec la polio, dans une situation où on vaccine les jeunes pour une maladie affectant en majorité des jeunes (5-20 ans). Il ne s’agit pas ici de vacciner les jeunes pour protéger les aînés.


III. Appliquer à SARS-CoV-2 ?

On le voit très clairement, les conditions d’une éradication, c’est-à-dire d’une disparition mondiale, sont extrêmement exigeantes et difficiles à réunir, même pour un virus qui répond aux trois caractéristiques indispensables : exclusivité humaine, faible fréquence de mutations, disponibilité d’un vaccin efficace empêchant la propagation.

Le SARS-CoV-2 ne possède aucune de ces trois caractéristiques. Penser pouvoir se débarrasser de ce virus par une vaccination généralisée est une illusion qui reste bien présente dans l’esprit des décideurs encore aujourd’hui, malgré les mises en garde souvent répétées depuis le tout début de la crise sanitaire. Cette erreur fondamentale encourage toutefois leur détermination à « en finir avec la crise COVID-19 » par un taux de vaccination aussi proche de 100% que possible.

Rendre obligatoire une vaccination dont l’efficacité contre l’infection et la propagation virale est loin d’être acquise, ce qui est actuellement démontré, n’a pas de sens. C’est en quelque sorte comme si on voulait éradiquer la polio avec une vaccination de type Salk.

Cette obligation vaccinale perd encore plus de son sens lorsque de nouveaux variants deviennent dominants tout en s’avérant moins pathogènes. On n’est certes pas à l’abri de la survenue d’un variant plus pathogène, mais c’est lors de la prévalence d’un variant peu dangereux que l’immunisation collective naturelle doit se généraliser, dans le plus strict respect de la protection des personnes à risque. Se débarrasser de ce virus sous ses diverses formes variantes, même potentielles n’est pas envisageable.

Une vaccination spécifiquement ciblée sur l’antigénicité du variant ‘omicron’ — à supposer qu’elle soit immédiatement disponible — ne résoudrait pas plus la question. En effet, sans même engager le débat sur l’inutilité d’une vaccination contre un variant s’avérant finalement peu pathogène et gérable par d’autres moyens, on peut considérer qu’une telle vaccination, ciblée exclusivement sur la protéine spike du virus , générerait, par pression de sélection, de nouveaux variants d’échappement, comme on a déjà pu le constater avec les vaccins contre la protéine spike de la souche de WuHan.

16 commentaires sur “Obligation vaccinale – Petite mise au point : COVID-19 n’est pas polio

  1. DENIS

    Bonjour. Merci pour article, intéressant. Comment pouvons-nous vaincre ce virus selon vous, si le vaccin n’est pas la bonne approche ?

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    1. Je ne dis pas que le vaccin n’est pas une bonne approche. Je dis : 1) que ce n’est pas et ne peut absolument pas être la seule approche ; 2) qu’en raison de (1) on ne doit pas évacuer toutes les autres approches ; 3) que s’obstiner à vacciner contre le virus original n’est pas le bon plan lorsque des variants règnent ; 4) que si Omicron est aussi bénin qu’il en a l’air, vacciner contre lui n’a aucun sens.

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  2. Valérie Duvivier

    Un grand merci pour toutes ces précisions et apports d’éléments scientifiques et historiques par rapport à cet argument de la polio sans cesse mis en avant.
    C’est désespérant de constater la rigidité de stratégies , maintient de cap et discours de nos dirigeants et en particulier de notre Ministre de la Santé qui malgré les évidences actuelles, persiste…On n’est plus dans la science ni le bon sens même!
    Affligeant de constater que les médecins sur le terrain qui soignent et prennent en charge les malades plus sévères en ambulatoires depuis plus d’un an et demi (Dr Bouillon et son asbl Lagardère par exemple qui a une expérience de terrain avec plus de 20 000 patients , Dr Sacré etc..) essaient comme vous en vain d’être entendus par la presse et les dirigeants et ne le sont pas!
    À nous au moins de diffuser un maximum vos derniers articles et de manifester dimanche.

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  3. Fabienne Cousin

    MERCI

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  4. Svetlana Roudyk

    Merci pour cette information importante. Avant qu’on impose une obligation vaccinale contreproductive,
    faut-il imposer aux gestionnaires de l’épidémie de covid-19 un cours pour pallier leur virulent illettrisme en virologie?

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    1. Je ne dirais pas illettrisme. Problème de perspective, peut-être…

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  5. boosoonyew

    Merci Bernard pour ton article !! Sûrement le vaccin COVID-19 jusqu’à la 3e dose ou la piqûre de rappel. Tout besoin supplémentaire ne fera que montrer à quel point cette immunité artificielle est inefficace !!

    p.s. Hope the Google Translate went well 😁✌🏻

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  6. Burniaux

    Faut arrêter d’essayer de nous endormir avec un pseudo vaccin qui soit-disant nous protégerait alors que notre système immunitaire est prévu pour, moyennant compléments alimentaires si nécessaire.

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  7. Burniaux Valéry

    Faut arrêter d’essayer de nous endormir avec un pseudo vaccin qui soit-disant nous protégerait alors que notre système immunitaire est prévu pour, moyennant compléments alimentaires si nécessaire.

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  8. Merci pour cette information ; mais pourquoi pas un mot au sujet des travaux des Prof. Pierre DELBET et Dr Auguste NEVEU sur les effets thérapeutiques du CHLORURE DE MAGNESIUM contre la poliomyélite ?

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    1. Parce que mon objet n’est précisément pas la poliomyélite.

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  9. Thomas Vanbaelen

    Bonjour Monsieur Rentier,

    Merci pour tous vos articles ainsi que pour tout ce que vous faites avec Covidrationnel.
    A la lecture de différents articles d’origine diverse, il me semble que la protéine spike est toxique, tant avec le virus qu’avec les vaccins.
    D’où ma grande interrogation : si les protéines spike des vaccins sont aussi mauvaises pour l’organisme que celles du virus, existera-t-il un vaccin réellement efficace et qui ne produise pas trop de toxicité et donc d’effets secondaires? J’ai encore lu récemment deux articles qui parlent du vaccin novavax ainsi que des vaccins à virus inactivé (rédigé par H. Banoun) et qui pointent également la toxicité de ces produits liée entre autres à ce maudit spike…
    Un vaccin avec tout le virus sauf la protéine spike?

    Je n’ai aucune formation scientifique et je suis donc très scientifico-naïf!

    Merci!

    Thomas

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  10. Alain Sibille

    Cela est juste, mais néanmoins, si toutes les personnes à risque (> 50 ans ?) étaient vaccinées, les USI seraient moins débordées. C’est tout de même un aspect du problème.

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    1. Ce serait simple, et c’est le bruit qui court, mais malheureusement ce n’est absolument pas démontré. Lisez la page 28 du bulletin épidémiologique hebdomadaire de Sciensano.

      Cliquer pour accéder à COVID-19_Weekly_report_FR.pdf

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    2. joss

      Des biais observationnels persistent et ne permettent pas de conclure.
      Ex pour les hospitalisations (pareil pour USI):
      -du 3 au 16 janvier, 192 personnes sont entrées en moyenne par jour à l’hôpital. Le statut vaccinal est connu pour 136 personnes. On ne connait donc pas le statut de 56 personnes, c’est énorme.
      -les durées d’hospitalisation ne sont pas prises en compte
      -les populations vaccinées/non vaccinées ne sont pas identiques.

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